Ce qu’accompagner veut dire
Maela PAUL
Chargée de Mission et d’Orientation au CNAM (Conservatoire National des Arts et Métiers) des Pays de la Loire, Nantes (44), France
Résumé/Abstract
Il n’aura échappé à personne que l’accompagnement, depuis une dizaine d’années, fait parler de lui. Mais derrière sa rassurante étiquette verbale, empruntant au parler de tous les jours, qu’est-ce qu’accompagner veut dire ?
Couvrant indistinctement les divers secteurs professionnels du thérapeutique, du social, du formatif ou du management, bousculant au passage les frontières disciplinaires et brouillant les distinctions conceptuelles, la notion d’accompagnement désigne-t-elle un champ unifié de pratiques ? Inversement, à travers la profusion des termes qui tentent de spécifier ici ou là des problématiques particulières comme coaching, counselling, tutorat, mentorat, parrainage ou compagnonnage, n’est-il pas possible d’identifier des pratiques qui ont « un air de famille » ? Peut-on à la fois concevoir le champ de l’accompagnement, identifier quelques problématiques et en dégager l’articulation ?
Cette contribution, s’appuyant sur un ensemble de recherches conduites dans le cadre d’une thèse universitaire, se donne pour objectif de montrer comment l’élaboration du champ sémantique d’accompagner à la fois fournit un modèle d’intelligibilité de cette pluralité et engage un questionnement à l’égard de trois problématiques fondamentales qui opèrent dans le processus de l’accompagnement.
Contenu
Les temps changent et avec eux les exigences
L’accompagnement tel qu’on le parle
Du nom vers le verbe : comprendre la diversité
Champ sémantique d’accompagner
L’accompagnement : une nébuleuse
Conclusion
Les temps changent et avec eux les exigences
l’ancrage social de la notion d’accompagnement : une question de redéfinition des places et des frontières
Si nous devons parler de l’accompagnement, autant s’assurer tout de suite que nous parlons bien de la même chose, c’est-à-dire de cette fonction apparue en France dans les années 901, se répandant indifféremment au travers de différents secteurs professionnels, fédérant tout en distinguant des notions aussi diverses que tutorat et parrainage ou encore coaching et counseling… La notion d’accompagnement se révèle en fait issue des difficultés rencontrées par les acteurs du terrain pour répondre à deux types d’exigence : la préoccupation d’un public désaffilié, désorienté, censé être autonome ou capable de le devenir et l’injonction de performance, d’excellence et d’efficacité toujours plus grande d’une classe dirigeante. La situation de crise sociale est en effet corollaire de la multiplication des professions d’interventions dont la tâche est d’accompagner. Surgissant entre le bénévolat et le professionnel, l’accompagnement souligne la position paradoxale de ces métiers : centrés sur l’individu et accrochés à des problématiques sociales.
Les réflexions qu’elle suscite la pose comme fonction – pourrait-elle être un métier ? – ou comme posture, renvoyant régulièrement à des questions du type : pour accompagner, faut-il se mettre derrière ? devant ? à côté ?… Le moins que l’on puisse dire, c’est que la fonction d’accompagnement, apparue dans les textes officiels autour des années 95, questionne la posture du professionnel, jette le trouble sur des tâches que l’on avait soigneusement distinguées, définies. L’accompagnement participe en effet de cette tendance sociale générale2 à la réactualisation de champs hier soigneusement séparés. Bien des pratiques professionnelles hier facilement distinguables (pratiques de soins, pratiques sociales, pratiques éducatives) se trouvent aujourd’hui confrontées à la nécessité de disposer de catégories mentales plus larges, permettant mieux de penser la complexité des situations auxquelles elles doivent faire face.3
Il y a bien là une redéfinition des places des uns et des autres, un recadrage des situations et un changement des représentations par lesquelles on en vient à penser la complexité des situations : les temps ont changé et on ne peut plus penser aujourd’hui l’accompagnement comme on le pensait il y a 20 ans, relevant uniquement des philosophies de l’assistance et du développement.
L’accompagnement comme questionnement
Mais le champ de l’accompagnement est-il pour autant unifié ? Derrière sa rassurante étiquette verbale, la pratique de l’accompagnement ne cache-t-elle pas des modèles contradictoires ? Quelle(s) thématique(s) peut-on isoler et identifier dans cette variété d’expression et de champs d’application ? Est-il possible d’identifier, dans le champ des pratiques, les caractéristiques d’une ou de plusieurs problématiques de l’accompagnement ? Finalement : qu’appelle-t-on accompagnement ? qu’est-ce qu’accompagner ?
S’il est une constatation assurée, c’est que ce domaine que nous prétendions explorer comporte de vastes zones vierges… Telles sont en effet les principales caractéristiques de l’objet que l’on se donne pour étude :
– L’accompagnement appartient à un registre de pratiques humaines qui ne relèvent pas d’une science ou d’une théorie appliquée.
– Comme il appartient à divers domaines professionnels, on ne peut l’enclore dans les limites d’une forme unique et fixe sur laquelle on a prise. L’accompagnement ne saurait donc être compris en se limitant à quelque interprétation au sein d’un secteur socioprofessionnel déterminé.
– Le sens de l’accompagnement ne peut non plus être défini en l’assimilant ni aux objectifs sociaux auxquels il sert via les institutions ni à l’évolution des professions ou à celle des nouvelles techniques (bien que contribuant à tous ces points).
– Si vaste que soit le domaine où s’exerce l’accompagnement, sauf à le définir comme « prestation » ou nouveau « service », il ne manifeste pas ouvertement ce qu’il est. Il ne se montre pas au grand jour de la pensée, dans la clarté qui permettrait de le définir. Il apparaît plus ou moins « en creux » immergé dans une pratique qui ne s’est longtemps pas souciée d’expliciter sa nature : il a sûrement été avant d’être… Enquêter sur l’accompagnement est le poursuivre là où le professionnel le voue normalement au silence ou dont il parle sur le mode du « cela va de soi ».
Il est apparu nécessaire, si l’on voulait poser l’accompagnement comme objet d’étude, de l’isoler de ses champs spécifiques (où il est devenu accompagnement de ceci ou cela) et d’ouvrir l’espace social dans lequel il ne trouverait que justifications et non signification. Mais comment saisir un objet lorsque les significations sont disséminées dans les usages métaphoriques du langage courant ? Le projet a alors été de procéder à la constitution du champ sémantique de l’accompagnement en engageant parallèlement une enquête lexicographique et étymologique, afin de tenter d’apercevoir, dans le maquis de son usage, quelques lignes de forces significatives.
L’accompagnement tel qu’on le parle
De l’idée première de relation…
Le mot accompagnement ne figure pas à ce jour dans la plupart des dictionnaires spécialisés, notamment ceux de l’éducation. Tout juste le trouve-t-on dans le Dictionnaire de la Formation et du Développement Personnel (1996, éd. ESF) désignant « une fonction qui, dans une équipe pédagogique, consiste à suivre un stagiaire et à cheminer avec lui durant une période plus ou moins brève afin d’échanger à propos de son action, d’y réfléchir ensemble et de l’évaluer« . Ailleurs il n’est question que de soutien, de tutorat4 ou de préceptorat5. Qu’il s’agisse de « relation de tutelle« , de « relation duelle privilégiée » (pour le préceptorat) ou d’une « sorte de relation d’aide » mais « pédagogique et éducative » (soutien), la relation à autrui fédère les différentes expressions.
Les dictionnaires de la langue courante rappellent quant à eux que c’est de son sens figuré (ce qui accompagne est ce qui vient s’ajouter)6 et de ses usages spécifiques que le mot accompagnement tire signification : le premier s’est développé en musique (17ès) où l’accompagnement désigne l’action de jouer une partie de soutien, s’adjoignant à la partie principale7 ; le second réfère à un usage militaire développant cette même idée de soutien avec l’intention de renforcer ou de protéger8. Au-delà de son usage musical, ce n’est qu’au 20ès que le mot accompagnateur a pris le sens de « personne qui accompagne et guide un groupe » ou encore « personne qui accompagne (temporairement, occasionnellement) une autre personne ou un groupe de personnes en déplacement« 9.
Ainsi, si la forme la plus simple de l’accompagnement est duale, c’est que le deux est effectivement le minimum requis pour la relation. Il y a relation dès lors que les deux termes sont unis10 dans un même acte au cours duquel la modification ou le déplacement de l’un entraîne la modification ou le déplacement de l’autre. Ce lien d’influence réciproque compose une unité éphémère puisque, à l’instar des musiciens, les deux ne sont liés que par ce qu’ils jouent ou ce dont ils se font les interprètes. Par cette mise en communication, par cette union initiale, un regard s’échange et quelque chose passe…
… co-vécue dans le temps
Mais puisqu’il ne saurait y avoir construction de la relation qu’inscrite dans le temps c’est-à-dire co-vécue, l’accompagnement n’est donc pas seulement aller avec, mais aussi aller vers. Cette dimension temporelle désigne à la fois la condition de la relation et l’intentionnalité qui lui donne sens. Si c’est bien le temps qui est contenant de la relation, c’est dans la dynamique de la relation à autrui que s’inaugure l’actualisation d’un rapport au temps. Le temps lui-même n’est pas donné : il est construit comme parcours, cheminement, passage, traversée et allure, rythme, tempo. De là découle la définition minimale de l’accompagnement : accompagner est aller avec / aller vers.
On ne saisira la portée de cet « allant vers » qu’en se référant à ce qui constitue, en fait, l’un des tout premier usages du mot. En effet, accompagnement est d’abord un terme de droit féodal désignant un « contrat d’association« 11 – plus précisément, un « contrat de pariage« 12: « unissant deux parties, généralement d’inégales puissances, pour la possession en commun d’une terre » (1239). Ce contrat d’association désigne à la fois le terme de la relation, la convention par laquelle une personne s’oblige envers autrui et la dimension d’intentionnalité : il y a bien une direction entreprise délibérément.
… « s’intervalorisant » autour d’un objet-tiers
Il revient donc à celui qui accompagne de s’engager envers cet autre, en contractualisant une relation articulée autour d’un objet-tiers. Accompagner relèverait donc de la capacité à se mettre ensemble à l’épreuve d’un référent commun. La présence de cet objet-tiers modifie le rapport puisque par lui s’opère un déplacement du regard des protagonistes de la relation vers l’objet. L’intervalle crée un espace propre pour qu’existe l’objet comme propos (au sens littéral de ce que l’on se propose ou se fixe pour but) et, ce faisant, permet à deux subjectivités d’être et de s’accorder. D’une certaine manière, on peut dire que, par la médiation d’un travail sur l’objet, la relation « s’inter-valorise » et, curieusement, c’est par ce qu’elle prend le risque d’inclure qu’elle demeure première, lieu « virtuel » du placement et du déplacement, de la centration et du décentrement.
On prendra garde toutefois de ne pas réduire l’espace relationnel à l’intersubjectif. S’il n’y a du social que lorsqu’il y a de l’autre, c’est que l’autre, le différent, voire l’étranger, avec la menace qu’il représente, crée l’interstice. Basé sur l’instauration d’une communication dialogique (qui ne peut être réduite à un simple transfert d’information), l’accompagnement renvoie pour une large part au travail de la parole et de l’écoute et à la création d’un « terrain d’entente », mais il ne procède véritablement d’une réalisation sociale que par ce « modelage mutuel d’un monde commun » dont parlait Varela. Ainsi ne suffit-il pas d’être deux pour qu’il y ait accompagnement. L’accompagnement ne se réduit ni aux personnes en présence ni à leur relation : il est aussi espace de co-existence et ce qui en résulte.
Si la relation est première, elle porte donc au moins cinq caractéristiques :
1) elle est asymétrique : elle met en présence au moins deux personnes « d’inégales puissances »,
2) contractualisée : elle associe ces personnes sur la base d’une visée commune, le contrat13 étant l’opération par laquelle une disparité de forme est compensée par une parité de fond,
3) elle est circonstancielle : la relation d’accompagnement est due à un contexte, à une situation ou à la traversée d’une période particulière – en conséquences, elle est :
4) temporaire : elle ne dure qu’un temps (elle a un début et une fin),
5) elle est enfin co-mobilisatrice : puisqu’elle implique de s’inscrire, l’un et l’autre, dans un mouvement.
Du nom vers le verbe : comprendre la diversité
Tridimentionnalité de l’accompagnement
La définition relativement univoque d’accompagner – se joindre à qqn /pour aller où il va / en même temps que lui – précise une organisation du sens selon trois dimensions :
– relationnelle sur le mode d’une jonction ou d’une connexion : se joindre à qqn ;
– temporelle sur le mode de la synchronicité : être avec en même temps ;
– spatiale sur le mode d’un déplacement : pour aller où il va.
On notera qu’être dans le même lieu ne suffit pas à décrire l’action d’accompagner. S’inscrire dans la foulée d’un autre non plus, pas plus que celle de se trouver ensemble à effectuer un déplacement. Les trois idées sont interdépendantes.
Le déploiement du sens littéral d’accompagner complète et précise ces trois dimensions en ouvrant trois espaces :
Déploiement du sens
littéral d’accompagner |
Un principe de similitude14 conduit à s’unir (« ne plus former qu’un tout« ), à se rassembler (« se joindre de façon à être ensemble« ), selon une relation entre personnes ayant une communauté d’intérêt ou d’affinité. La concordance (accord) est première. C’est sur la base d’un « ensemble » que s’organise l’espace de la connexité et du partage qui consiste à faire sienne la question de l’autre. L’entreprise peut donc échouer pour avoir transformé la communauté de vues en objectif défini a priori.
Le principe dynamique qui régit accompagner relève d’un décentrement. Procédant du connu vers l’inconnu, de là où l’on se trouve vers un ailleurs, vers un nouvel arrangement, il implique toujours de quitter sa place. De là les idées de mise en mouvement, de voyage ou de chemin, de marche ou de cheminement, de direction ou d’orientation. Ce dynamisme est donc créateur d’un écart différenciateur entre ce qui est et ce qui advient. Mais c’est bien autrui qui a, sinon l’initiative du mouvement, ou même l’intention, au moins quelques idées de là où il ne veut pas aller… L’entreprise peut donc échouer à cet endroit également.
Le principe d’altérité est générateur de symétrie/dissymétrie : toujours les deux « font la paire », mais il y a l’un et il y a l’autre, c’est-à-dire le second, et les deux sont distincts. La concomitance exprime la coexistence de deux choses, le rapport de simultanéité entre deux faits. L’entreprise peut échouer par défaut d’une bi-partition15 impliquant d’articuler synchronicité (dans le temps) et distinction (dans l’espace).
La composition du verbe accompagner confirme l’accompagnement comme porteur d’une tridimentionalité (relation / temps / espace) et animé simultanément par trois logiques :
Composition étymologique du verbe accompagner |
De l’idée de partage…
On notera tout d’abord que l’idée de compagnon a plusieurs sources :
– celle qui a pour base « panis » (pain)16 : cette première souche s’organise autour des idées de partage d’une cause commune ;
– celle qui a pour base le latin « socius » : désignant lui aussi à l’origine le « compagnon de guerre« , l’associé, l’allié, il renvoie à l’idée d’un rassemblement « en vue de » ;
– celle enfin qui a pour base le latin concomitans désignant le « compagnon de route ».
Le terme compagnon, qui a d’abord eu le sens de « celui qui vit et partage ses activités avec quelqu’un« , désigne celui qui est « logé à la même enseigne » : même ration, même conditions, même contraintes… Mais être compagnons est-il la même chose qu’être accompagnant et accompagné ? Dans le premier cas, la relation, bien que binaire, vise en effet à reconstituer un « ensemble ». Dans le second, la bi-polarité est différenciatrice : c’est la tension entre les pôles qui est productrice du dynamisme. Il n’y aurait donc accompagnement que s’il y a déplacement, visée transformatrice, passage d’un état à un autre. Comme le rappelle Le Bouedec17, l’accompagnement n’est pas seulement partage et communion : il est aussi passage et dépassement. L’accompagnant reste un passeur (il aide à passer ou dépasser une étape) et un passant (il est de passage) – et non un compagnon partageant la vie et les occupations, le pain et le pas, les sentiments et l’idéal, et les mêmes épreuves…
… à celle de pourvoir à ses besoins
Mais curieusement, alors qu’afin de percevoir l’action engagée on interroge le verbe de préférence au substantif, il semblerait que l’action se dérobe. Or si l’emblème symbolique que constitue le pain renvoie à l’idée de partage et à ce qui sert à subsister, entretenir son existence, pagnis / pain renvoie à pascere / nourrir18 à partir duquel il est commode (et justifié sémantiquement) de passer de l’idée d’alimenter à celle d’élever : nourrir est « pourvoir quelqu’un de moyens de subsistance« , en d’autres termes, mettre quelqu’un en possession de ce qui lui est nécessaire pour subsister, c’est-à-dire survivre.
En fait, les deux idées n’ont aucune raison de s’exclure. D’une part, quel mouvement peut être essentiel, vital pour tout être vivant, si ce n’est celui par lequel il en vient à grandir, mûrir, évoluer, se transformer et créer ? Et qu’est-ce qui peut mieux définir le terme d’un accompagnement que la venue d’un temps où l’on devient capable, à son tour, d’accompagner ? D’autre part, si l’on reconnaît dans les préfixes ac– et com– les dimensions temporelles et relationnelles, c’est donc l’espace qui est donné en partage. On réentend à cette occasion l’expression citée plus haut de Varela aux côtés de cette affirmation de Paolo Freire : « Personne n’éduque autrui, personne ne s’éduque seul, les hommes s’éduquent ensemble par l’intermédiaire du monde« 19.
… et de mitoyenneté
Par ailleurs, qu’il soit partage d’un morceau de route ou d’un morceau de temps, qu’il faille pour accompagner être avec, contre, à côté, devant ou derrière… peu importe : deux existences distinctes occupent le même terrain, le même temps et cette bi-partition est créatrice de mitoyenneté.
On voit bien dans quel registre se déploie l’accompagnement : celui du co– définissant la relation comme coopérative (au sens de Saint-Arnaud 1999 : sur la base d’un but déterminé conjointement, d’une reconnaissance mutuelle, d’un pouvoir partagé), d’un co-développement (Payette, Champagne 2000), d’une co-construction (Avenier 2000) résultant « d’une approche globale du territoire et du devenir ». La configuration interpersonnelle est à la fois écart, entre-deux, et creuset d’une co-existence, d’une com-présence.
L’idée qu’accompagner projette est que toute aventure partagée sous son enseigne sera inscrite au registre de la simultanéité – inscrivant non seulement « un acte à deux faces« , sollicitant activité et passivité conjointement en chacun, mais l’évidence que l’un et l’autre constituent « deux scènes où il va se passer quelque chose« 20.
Champ sémantique d’accompagner
Enfin, si cette étude postulait, il est vrai, de l’implication de trois modèles, rien ne laissait supposer qu’on en trouverait l’organisation dès le premier travail engagé, c’est-à-dire dès l’élaboration du champ sémantique du verbe accompagner. Or cette élaboration, effectuée à partir de dictionnaires de la langue courante, montre que trois synonymes le plus fréquemment associés à accompagner : conduire, guider, escorter.
Graphe d’accompagner
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Conduire inscrit l’idée d’une autorité exercée, d’une poussée, d’une sollicitation à la mise en mouvement. En même temps, il s’agit d’aller dans une certaine direction, selon une certaine « ligne de conduite ». La relation est nécessairement hiérarchisée et suppose maîtrise, autorité, responsabilité, fermeté, capacité à influencer. L’ensemble suggère des modalités d’apprentissage qui confrontent nécessairement au nouveau : il s’agit d’initier, former, bref : de se risquer ou de s’aventurer avec ce que cela induit comme incitation à se « prendre en main ». Conduire préside donc la région sémantique caractérisée par l’influence que les hommes exercent les uns sur les autres quant à la conduite de leur existence et la limite de ce pouvoir.
Graphe de conduire21
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Guider évoque l’aide au choix d’une direction et donc la capacité à anticiper une action. Il ne s’agit plus d’exercer une autorité mais de délibérer ensemble, tenir conseil sur l’orientation à choisir. Sur le chemin, le guide avance « en éclaireur ». Notons que, s’il n’y a pas de relation directe entre orienter et conseiller, c’est que guider n’est pas conseiller à autrui l’orientation qu’il doit donner à son chemin, mais seulement veiller à ce qu’il prenne son chemin. Le mouvement implicite à cette organisation procède de l’obscurité vers la lumière, du caché vers le révélé : éclairer, éclaircir, placer devant les yeux, montrer, faire voir, rendre clair… Guider évoque le domaine de la relation à autrui dans une situation de pesée, de délibération intérieure, de choix et de décision quant à l’orientation à donner à son existence.
Graphe de guider22
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Escorter : évoque le souci de protéger, défendre, soutenir, remédier, restaurer ou réparer. Il consiste à apporter consolation et soutien dans l’adversité (réconforter) et protéger contre un danger, un risque, un obstacle, un ennemi, avec l’idée de faire opposition (défendre). Escorter ouvre une région sémantique caractérisée par un mouvement qui consiste à faire opposition (défendre), faire obstacle (empêcher) : remédier est bien « combattre un mal » – et une action qui consiste à réparer (restaurer), remettre sur pied (rétablir). Le mouvement a pour visée de rétablir une verticalité.23 La relation est nécessairement asymétrique puisque l’accompagné est en position de faiblesse. Entre la fonction de guide et celle de la direction se déploie le registre de l’aide : escorter préside le domaine de l’attention portée à autrui (aide, assistance, secours, protection) en situation de difficulté.
Graphe d’escorter
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Les trois régions sémantiques d’accompagner
En déployant tout le champ sémantique d’accompagner, de synonyme en synonyme, on voit qu’il y a bien là trois registres de praxies qui renvoient à des rôles spécifiques et transversaux :
– avec escorter : tout le registre de l’aide, de l’assistance, du secours et de la protection,
– avec guider, tout le registre du conseil, de la guidance et de l’orientation,
– avec conduire : tout le registre de l’éducation, de la formation et de l’initiation.
Bien loin d’en uniformiser la conception, le champ sémantique dans son déploiement permet tout au contraire de lire la pluralité des postures auxquelles l’accompagnement convie. Il rend possible également la compréhension de cette prolifération de pratiques autour de l’idée d’accompagnement. Conseiller, médiateur, interprète, guide… : toutes les figures de l’accompagnateur, à la fois comme intermédiaire et opérateur du tiers, prennent place et sens dans la constellation.
L’accompagnement : une nébuleuse
Tout domaine de savoir et d’activités est caractérisé par un ensemble de termes et d’expressions qui lui sont nécessaires et spécifiques. Aussi n’est-il pas anodin, au moment où l’accompagnement émerge en France comme pratique professionnelle (années 1990), d’observer un retour conséquent d’anglicismes (counselling, coaching, sponsoring, mentoring) qui, sans être des néologismes, sont utilisés avec des contenus renouvelés et contribuent notamment à la différenciation entre pratiques spontanées, bénévoles, et pratiques professionnelles. Ces anglicismes côtoient une multitude d’autres termes (tutorat, conseil, parrainage…) tandis que le mot accompagnement, malgré ou grâce à son imprécision, opère un consensus et se trouve adopté par des secteurs d’activités aussi divers que le tourisme ou les sports, le domaine éducatif, médical ou celui de l’insertion, le terme ne trouvant à se déterminer que par son champ d’intervention. Or, si l’on regarde plus près, tous ces termes, loin d’être des néologismes, viennent « habiller » autrement des idées fort anciennes.
Nébuleuse de l’accompagnement
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Counselling et l’idée de conseil
Ainsi le terme anglais counselling (moyen anglais 1150), désignant aujourd’hui un processus d’aide dans l’orientation, provient en fait du vieux français consel24 (10ès). Issu du latin consilium,25 le terme contenait l’idée de résolution, plan, mesure, dessein, projet – et ajoutait à ces mesures les valeurs qui les président : délibération (intérieure), réflexion et décision, sagesse, prudence et habileté. Quant au verbe conseiller, il apparaît successivement avec le sens de « guider qqn dans sa conduite » (1080), « indiquer qqch à qqn » (1170), mais surtout, il couvre, tout en les différenciant, les idées aujourd’hui déliées de conseiller, demander conseil et tenir conseil – ainsi que secourir, aider, diriger, gouverner, délibérer, réfléchir26…
Sponsoring et l’idée de parrainage
Le terme sponsoring est aujourd’hui équivalent de parrainage : le mot anglais provient, en effet, à la fois du latin classique sponsor signifiant répondant, caution et du latin religieux avec le sens de « parrain d’un néophyte« . Comme dérivé du premier, il a le sens de « promesse verbale et réciproque entre deux parties concernant le paiement d’une caution« , puis celui de promesse ou d’engagement réciproque. Du second il tire sa conception de parrain désignant celui qui tient un enfant sur les fonds baptismaux (8ès) et veille à son éducation religieuse. Par analogie, le parrain est celui qui préside à l’introduction dans le monde ou dans un cercle. On sous-estimerait l’impact de l’imaginaire si l’on ne relevait pas le rôle que la marraine joue dans les contes de fées où elle fait, comme le rapporte Renée Houde (1996), « office de passeur » et de « souffleur de dons« .
Aujourd’hui, il est à la fois utilisé comme autrefois mécène dans la fonction de soutenir une entreprise (artistique pour le mécène, sportive pour le sponsor) ou une personne par un appui moral et/ou un moyen financier – et comme fonction de médiation : celle-ci prévaut dans l’idée du parrainage mis en place ces dernières années, consistant à « accompagner des jeunes dépourvus de réseau personnel de relation avec les milieux professionnels, dans leur recherche d’emploi« 27.
Le coaching et l’idée d’entraînement
Le terme coaching est utilisé au sens d’entraînement sportif ou de cours particuliers. Le coach est un entraîneur, un répétiteur ou un professeur particulier. Si coach provient effectivement du hongrois kocsi, il aurait une même origine que le mot cocher28 désignant « le conducteur de voitures hippomobiles transportant des personnes« . Coach renvoie donc au domaine de la conduite. Le coach au sein des entreprises a pour fonction de développer les compétences et le potentiel des hommes de l’organisation : il est « catalyseur« , « donneur de souffle » (expression de Sérieyx) ou encore « accoucheurs de talents« , « développeurs de potentiels« 29, mais l’idée de coaching se trouve bien plus souvent liée à celle de performance.
Le mentoring et l’idée d’éducation
Quant au terme mentoring (introduit en anglais début 18ès), il n’a pas d’autre origine que Mentor, guide et conseiller d’Ulysse auprès de son fils Télémaque en son absence, dans l’œuvre d’Homère, puis celle de Fénelon. Mentor s’employait à propos d’une personne sage et expérimentée servant de conseiller, spécialement de la personne qui prend soin de l’éducation d’un jeune homme (Saint-Simon). Il a pour équivalence un terme tombé en désuétude : précepteur, « celui qui enseigne, qui est chargé de l’éducation d’un enfant » (1460), puis « personne qui instruit les hommes, leur apprend à mieux vivre » (16ès). Le terme connaît aujourd’hui fortune outre-atlantique30, mais il a vraisemblablement de tous temps désigné la fonction que les uns exercent auprès des autres comme modèle en qualité de directeur de conscience, maître spirituel, conseiller ou pédagogue.
Le compagnonnage et l’idée de transmission
Le compagnonnage évoque d’abord le fait de se rassembler entre gens d’un même métier (développant la transmission de la technique et la solidarité de métier) et d’une tradition philosophique respectueuse de la vocation de l’homme et des « gestes » (producteurs d’œuvres) par lesquelles s’exprime l’identité humaine en relation avec le sacré. L’idéal compagnonnique est incarnée dans l’idée de « ne pas séparer » (De Castera 1988) : ne pas séparer la tête, le cœur et les mains, autrement dit l’héritage transmis, la communauté de vie et les œuvres produites. L’idée de communauté et celle de globalité de la personnalité humaine caractérisent cette démarche (par ailleurs signifiante par la persistance de ses rites). La formation du compagnon conjugue l’enracinement (dans le métier) et l’itinérance (le voyage ou pérégrination), les qualités techniques et les qualités humaines, le geste et la pensée… Si le compagnon « fini » est appelé à son tour à transmettre, c’est bien qu’il y a eu déplacement, transformation, changement de position puisqu’il est passé de la position d’apprenti, avec tous ses grades, toutes ses épreuves, la fabrication du chef d’œuvre et une vie communautaire, à celui de compagnon, fonction de transmission dans laquelle « il enseigne moins qu’il n’accompagne » (id p.96). Le compagnonnage désigne en fait la finalité d’un accompagnement.
Le tutorat, l’apprentissage et la socialisation
Avec le compagnonnage, on n’est plus très loin des fonctions du maître d’apprentissage, mais « à une différence près » : la perte d’une relation au sacré. Le terme tutorat est récent en Français (1980). Issu du vocabulaire juridique et familial, utilisé métaphoriquement dans le registre horticole, le tutorat tend à se dégager de la connotation de tutelle30 qu’il détient de ses origines latines31. Il désigne la prise en charge collective par des adultes, dans leur rôle social et professionnel, de jeunes en phase d’intégration par le travail. Ainsi le tuteur, comme le maître d’apprentissage, s’inscrit-il dans une tradition de transmission de la culture ouvrière ou artisanale par les pairs avec une double mission : de transmission (d’un savoir-faire) et de socialisation.
Le moniteur (latin monitor : à l’origine souffleur au théâtre) désigne le conseiller, le guide, l‘instructeur.
Conclusion
Une hétérogénéité articulée…
En choisissant telle appellation, c’est tout un référentiel qui est sollicité et des valeurs qu’on privilégie : valeurs d’autorité experte et de compétence professionnelle (maître d’apprentissage ou de stage, directeur de recherche…), valeurs symboliques du passage à l’autonomie, valeurs de la solidarité organique (le parrain introduit le filleul dans la communauté de travail), du partage mutuel et de la transmission (le compagnon est celui avec qui on partage quotidien, travail et connaissances)…
Mais on voit bien, si on s’autorise à lire cette nébuleuse de pratiques à la lumière du champ sémantique qu’il y a là de nouveau trois registres, préalablement décrits en relation avec conduire / guider / escorter, et que l’on devrait donc pour voir approfondir (comme l’étude s’y engage) au regard de trois problématiques fondamentales appartenant à la tradition philosophique de l’accompagnement. Par ailleurs tout le champ de l’accompagnement n’est unifié que par les tensions qui le traversent : la dialectique dépendance / autonomie n’est que l’une des tensions arc-boutant les registres d’escorter et de conduire.
S’instaurant entre ordre et désordre, autorisant à combiner les genres, à procéder à des comparaisons, à des mises en relation, à des tensions dialectiques, poussant à relever les limites, ce qui est proposé à la réflexion ne constitue pas une formalisation mais procède d’un repérage par lequel s’identifient quelques clés théoriques et épistémologiques permettant de déchiffrer ces pratiques émergeantes. Sans structurer ni épuiser la complexité du réel, il permet d’envisager la pluralité sans exclure du champ les particularités. L’assemblage que réalise le champ sémantique reste en effet hétérogène : il contribue à donner sens à ce qui se présenterait de manière ou bien éclatée ou bien confuse.
Paradoxalement, tout se passe comme si l’accumulation de dissociations, de cloisonnements autant pratiques que théoriques, ayant en quelque sorte atteint un seuil, exigeait aujourd’hui une recomposition soucieuse de préserver la prise de conscience d’une réalité complexe. Les « terrains » actuels des différents exercices professionnels, à la fois par l’effondrement des valeurs traditionnelles et la créativité sociale, s’en trouvent caractérisés par une de ces « boucles étranges » combinant un effet de décomposition et de reconstruction.
Dire que l’accompagnement se distingue des autres formes que sont la relation d’aide, le suivi social, la tutelle… comme étant en tension avec toutes ces pratiques, revient à concevoir les tensions dont il est l’objet et, concrètement, la combinaison de logiques et la pluralité des rôles que doit assumer un accompagnateur au cours de son action.
… sur un fond commun
Mais, quelles que soient les formes qu’emprunte l’accompagnement, il semble que l’on puisse identifier le « fond commun » qui les caractérise. En effet, si la relation est bien contenue dans le temps, c’est qu’accompagner relève d’une logique de procès. A l’origine de tout processus, il a toujours deux instances (Jullien 1989) pour lesquelles la relation de différence est la condition même d’une logique d’interaction mutuelle et la condition d’un procès puisque rien ne peut advenir qu’au travers de ce binôme et de son jeu d’opposition – association. La différence n’est que relative, autrement dit corrélative à la relation elle-même. Celle-ci, tout en étant originellement constitutive de l’accompagnement, n’est que la mise en scène de ce qui doit advenir, ce « tiers secrètement inclus« 32 et pour lequel il convient d’être toujours disponible, toujours « allant » (avec et vers), puisque nul ne sait ce qu’elle va produire. Et si la relation relève bien d’un procès, ce qui doit advenir pourra être compris comme passage entre latent et manifeste, comme émergence hors de la latence (id). Car c’est bien là la dynamique de l’accompagnement que d’être allant c’est-à-dire en déploiement.
Auteur
Maela Paul est Doctorante en Sciences de l’Éducation à Nantes. Ses travaux de thèse sur l’Accompagnement sont dirigés par Michel Fabre. Elle est détient un DEA en Sciences de l’Éducation de l’Université de Nantes (recherche sur L’Accompagnement, dirigée par Michel Fabre) et un DESS Fonctions d’Accompagnement en Formation (Bilans de Compétences, Orientation, Validation des Acquis et Histoire de Vie) de l’Université de Tours, en Sciences de l’Éducation (direction Gaston Pineau). Elle a réalisé son mémoire sur Le Recommencement à retravailler sous la direction de Jean-Pierre Boutinet. Pmaela@aol.com
Notes
- En effet, les années 1990 sont caractérisées par l’essor des pratiques d’accompagnement qui surgissent notamment dans le travail social (où elles contribuent à l’insertion), dans les placements judiciaires, dans la formation (et les apprentissages en alternance), dans le travail éducatif spécialisé, dans le travail soignant (sous la forme d’accompagnement de la fin de vie) ou encore dans le monde économique (coaching des managers…).
- Ce phénomène se lit également dans le renforcement de l’organisation du travail en équipe ou en réseau : plusieurs espaces d’action sont alors rassemblés pour répondre à la spécificité et à la complexité de chaque situation. Cette nouvelle organisation suppose un référent qui, selon les lieux, est différemment nommé, mais assume des fonctions ou rôles de l’accompagnement.
- CRF – CNAM, 2001, Questions de Recherche en Education, vol.2, Action et Identité, INRP
- Dictionnaire de Pédagogie (1996, éd. Bordas).
- Dictionnaire Encyclopédique de l’Education et de la Formation (1994, éd. Nathan).
- On parlera alors de garniture avec l’idée de complément et d’accessoire.
- D’où dérivent les synonymes de l’accompagnement tels que harmonie, harmonisation, accord, résultant d’un assemblage de sons : l’harmonie résulte des relations établies entre les parties d’un tout qui fait que ces parties concourent à un « effet d’ensemble ».
- De cet usage spécialisé découlent les principaux synonymes du mot accompagnement : appareil, attirail, bataillon, compagnie, convoi, cortège, entourage, équipage, escorte, suite… autour de l’idée de « faire route ensemble« , « s’acheminer vers la même direction« .
- Trésor de la Langue Française p.396.
- L’idée de base est double :
– se joindre (se toucher sans laisser d’interstice, mettre en communication, ensemble, aller avec) renvoyant à la racine I-E yug– « atteler » (grec zugon « joug », zeugnumai « joindre », zugôma–alos « tout ce qui sert à assujettir », zeugma-atos « lien »).
– s’associer : faire route ensemble sur la base de vues communément partagées.
- Dictionnaire Historique de La Langue Française, 1995.
- Trésor de la Langue Française volume 12, p.999.
- Le contrat, fondamentalement, « traduit l’exigence d’une parité de nature malgré la dissymétrie » (Fabre 1994 p.250).
- Si la similitude est l’apanage « de toutes les formes initialement inégales du lien entre soi-même et l’autre » (Ricoeur 1990 p.226), c’est que « le principe de similitude n’est autre que celui de coïncidence des contraires…
Trop souvent en méditant ce fameux principe, l’on fait tomber l’accent sur la notion de contraire – par une vieille habitude aristotélicienne et par une tension « dialectique » – alors que l’essentiel de la procédure est le mysterium conjunctionis, la coïncidence » (Durand, 1996, Les Champs de l’Imaginaire, p.203). - C’est là que l’accompagnement au sens musical prend sens.
- Le compain étant le soldat qui partage la même ration (11ès).
- Le Bouédec, G. (1998). La Fonction d’Accompagnement dans le cheminement spirituel au sein de la tradition chrétienne, p.473-194, in Accompagnements et Histoire de Vie, Gaston Pineau (coord.), L’Harmattan
- En ancien français (Greimas), paistre signifie manger, nourrir, combler. A son tour, nourrir (fournir les aliments nécessaires à un être vivant) conjugue les idées d’allaiter (un enfant), alimenter (un animal), pourvoir à l’entretien de qqn.
- Freire, P. ( 1967). Pédagogie des Opprimés, Maspero, p.62.
- Merleau-Ponty (1964). Le Visible et l’Invisible, p.317, éd. Gallimard.
- Conduire est mener (qqn) quelque part en étant à la tête du mouvement (faire adopter une certaine conduite).
Gouverner est exercer une influence déterminante sur la conduite de (qqn).
Diriger est conduire comme maître ou chef responsable, exercer une influence.
Commander est exercer son autorité sur (qqn) en lui dictant sa conduite.
Pousser est soumettre à une pression, un choc permettant de mettre en mouvement dans une certaine direction. - Guider est accompagner (qqn) en montrant le chemin, conduire (qqn) en veillant à la marche, pousser (qqn) dans une certaine direction, mettre (qqn) sur la voie, aider à reconnaître le chemin, aider à choisir une direction, aider à trouver son chemin.
Conseiller est guider (qqn) en indiquant ce qu’il doit faire.
Orienter est indiquer à (qqn) la direction à prendre, déterminer la position que l’on occupe (se repérer).
Déterminer est fixer par un choix, entraîner la décision volontaire de (qqn).
Avertir est informer (qqn) de (qqch), appeler son attention sur. Éclairer (qqn) est mettre en état de voir clair, comprendre, discerner le vrai du faux.
- Les « tissus de soutien » en botanique assurent le port dressé du végétal. Une personne qui soutient une cause est qualifiée de « pilier ». Le tuteur a pour fonction de soutenir (suivre, assister et surveiller) dans la perspective d’un redressement. Corriger et redresser riment avec surveiller.
- Greimas, 1986-1968, Dictionnaire de l’Ancien Français, éd. Larousse
- En latin, le consiliarius est à la fois conseiller et interprète. Consilior contient la double idée de tenir conseil (délibérer) et de conseiller (délibérer au profit de), Dictionnaire Gaffiot.
- Le conseiller devient une personne qui donne des conseils dans un contexte institutionnel (1340). Une personne déconseillée (1050) est « désemparée » (désorientée dirait-on aujourd’hui) (Dict. Historique)
- Circulaire du 8.11.96 relevant de la loi quinquennale de décembre 1993 sur les conventions de parrainage.
- Au 19ès, le mot coach, dans la langue française, signifie diligence, plus précisément « un carrosse de diligence« , i-e un carrosse ayant la spécificité de rendre un service rapide (« empressé« ).
- Boltanski, L., Chiapello, E. (1999). Le Nouvel esprit du Capitalisme, éd. Gallimard, 843p.
- Houde, R. (1996). Le Mentor : transmettre un savoir-être, éd. Hommes et Perspectives, Québec : l’auteur a recensé plus de 1000 articles, en 1993, dans lesquels le mot mentor apparaît soit dans le titre soit dans l’énoncé.
- État de dépendance d’une personne soumise à une surveillance.
- Le latin tutor désigne un défenseur, un protecteur, un gardien (tueri / protéger).
- Expression de Basarab Nicolescu.
Abstract
We are all aware that accompaniment has had a very high profile in the last ten years. It is a reassuring label borrowed from everyday language, but what does to accompany mean?
Indiscriminately covering various therapeutic, social, educational and management fields, crossing disciplinary borders and scrambling conceptual distinctions, does the notion of accompaniment designate a unified set of practices? Inversely, in the profusion of terms that attempt to identify specific issues, such as coaching, counselling, tutoring, mentoring, sponsorship and the buddy system, is it not possible to identify practices that have a family resemblance? Can we simultaneously define the field of accompaniment, identify a few issues and map out how they are related?
This contribution is based on a body of research conducted for a PhD thesis. Its objective is to show how the development of the semantic field of accompany both provides a way of understanding the plurality of the concept and gives rise to questions about three fundamental issues in the accompaniment process.
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